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Implanté au coeur de Cassel

Haut Bonheur de la Table : aux confins de la mer et de la terre

Avec sa terrasse surplombant les Flandres et son intérieur typique d'une maison flamande, le restaurant Haut Bonheur de la Table s'inscrit dans l'esprit des bonnes tables étoilées où la décontraction et la simplicité font l'originalité du lieu tout en proposant des assiettes où le produit est travaillé dans le moindre détail.

Eugène Hobraiche, chef étoilé d'Haut Bonheur de la Table, sur la Grand'Place de Cassel. © Lena Heleta
Eugène Hobraiche, chef étoilé d'Haut Bonheur de la Table, sur la Grand'Place de Cassel. © Lena Heleta

L'histoire d'Haut Bonheur de la Table, c'est celle de belles rencontres dans la vie et la carrière d'Eugène et Marie-Pierre Hobraiche, tous deux issus du lycée Jessé-de-Forest d’Avesnes-sur-Helpe. S'ensuit une quinzaine d'années dans différentes maisons et une formation pour Eugène Hobraiche par des meilleurs ouvriers de France.

Déjà attiré par les étoiles, cet originaire du Cateau-Cambrésis passera notamment par la table du triplement étoilé Régis Marcon, mais aussi par celle du chef Eric Pras et Jacques Marcon. Une expérience marquera particulièrement le couple : la rencontre avec le chef vichyssois Jacques Decoret (1 étoile au Guide Michelin), pour laquelle ils quittent la montagne du Haut Pays du Velay où ils s'étaient installés pour travailler au restaurant. Eugène sera second de cuisine et Marie-Pierre en salle avec Martine Decoret durant cinq ans. «Et puis on s'est dits que ce que l'on faisait pour les autres, on pourrait le faire pour nous» se rappelle Eugène Hobraiche.

De l'authentique dans une ville touristique

Une mûre réflexion qui ramène le couple dans le Nord, sa région natale. «Je ne connaissais pas du tout Cassel, je m'y suis arrêté par hasard et un restaurant traditionnel était à vendre, sur la Grand'Place. Quand on a visité, tout était en violet, avec des clowns partout !». Pourtant, cela n'effraie pas le couple qui ouvre Haut Bonheur de la Table en 2013, sans y faire de rénovations durant deux ans.

Le restaurant compte une vingtaine de couverts. ©Lena Heleta

Un an après, le guide Michelin leur attribue «deux fourchettes» puis en 2016, l'«Assiette Michelin» qui récompense les tables pour la «qualité des produits et le tour de main du chef». Une distinction qui offre à la ville de Cassel sa toute première entrée dans le fameux guide. Rapidement, l'envie d'apporter une touche personnelle à ce lieu empreint de sens prend le dessus et après un mois et demi de travaux, l'ancienne salle de restaurant retrouve son parquet et ses boiseries d'origine. Ici, rien de clinquant ni de moderne mais le charme de l'ancien, si cher à Eugène Hobraiche. «C'est un peu comme à la maison» sourit le chef.

Défenseur du territoire

En 2017, c'est la consécration avec la toute première étoile : «On ne s'y attendait pas. J'étais seul en cuisine, ils étaient seulement deux en salle. J'ai tout de suite répondu : 'Vous êtes sûrs qu'elle est pour nous l'étoile ?'» ! Depuis, ils sont sept à proposer une cuisine simple de mariage de produits de qualité. «C'est une cuisine de détail, avec le produit au service de la technique. Tous les mois, je fais table rase de la carte et je ne refais jamais le même plat, sauf le Chocolat Mont Cassel, une mignardise imaginée il y a 10 ans que les clients me demandent». Celui qui avoue ne pas dormir beaucoup, trouve son inspiration lors de virées en voiture mais aussi dans les 300 m2 de potager attenant au restaurant et les six hectares de verger de son beau-père.

Eugène Hobraiche en est fier : «Je suis sûrement le moins cher de tous les étoilés». Il faut dire qu'avec un premier menu à 50€ et un second à 63€, les prix détonnent un peu avec ceux de la métropole lilloise... «Quand nous avons eu l'étoile, je n'ai pas voulu changer ma politique de prix. Je veux continuer à faire venir la clientèle locale et à démocratiser la cuisine. Quand on vient ici, on est détendus.» 85% des produits viennent de la région et Eugène Hobraiche travaille avec des producteurs des alentours, qu'il s'agisse du chou-fleur, des pigeons, de la volaille ou des fromages – il propose d'ailleurs un plateau d'une quinzaine de fromages casselois.

Une maison d'hôtes pour prolonger l'expérience

En pleine période Covid, le couple décide d'investir dans la bâtisse voisine du restaurant pour y aménager cinq chambres d'hôtes. «Il y avait une demande sur Cassel, qui est pile dans l'axe de la Côte d'Opale et de la métropole lilloise. Comme il n'y avait pas d'offres, on s'est rapidement positionnés et on accueille aujourd'hui une clientèle un peu plus large, parisienne et étrangère».

Baptisée La Maison de Marie, ce second établissement est géré par Marie-Pierre et accueille aussi des stages de cuisine, tous les mardis. Ouverts à tous, quelque soit le niveau, ils permettent aux participants de travailler des produits locaux, parfois méconnus. «Le but n'est pas de faire des recettes de restaurant étoilé mais de donner des astuces avec des produits qu'ils ne connaissent pas forcément» détaille le chef, qui mange ensuite avec eux dans la belle verrière surplombant les Flandres.

Parmi les projets du couple pour les mois à venir, la rénovation d'une des deux salles du restaurant, alliant le moderne et le traditionnel. Et bien sûr, la quête de la seconde étoile : «Oui, on y travaille. C'est une rigueur et je ne vais pas changer ma cuisine pour l'obtenir. Ce qui me guide, c'est d'aller encore plus loin dans le détail des produits. On ne peut pas s'endormir sur ce qui fonctionne aujourd'hui. Pour moi aujourd'hui être chef, c'est aider les autres à avancer, qu'il s'agisse des collaborateurs ou des producteurs.»